Cela fait maintenant un mois que Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur français, a annoncé la dissolution du groupement écologiste Les Soulèvements de la Terre. Le 28 mars 2023, c’est face à l’Assemblée nationale que le premier flic de France abat de nouveau son courroux sur la société civile, quelques jours avant ses propos polémiques sur la Ligue des droits de l’homme. Mais il semblerait que toute cette agitation soit vaine ; la procédure de dissolution peine à s’enclencher.
Un gouvernement qui montre les dents…
La meilleure défense reste l’attaque pour un gouvernement Borne qui ne cesse de décrédibiliser les acteurs de la société civile et leurs combats. Dans l’affaire des mégabassines de Sainte-Soline, Gérald Darmanin se noie et emporte avec lui la crédibilité de l’exécutif. Après son annonce de la dissolution des Soulèvements de la Terre, le mouvement écologiste riposte sur son site et invite ses sympathisants à signer leur tribune pour « rendre caduque cette tentative d’étouffement ».
Tentative d’étouffement qui vise également la Ligue des droits de l’homme après leurs observations à Sainte-Soline. Questionné le mercredi 5 avril sur le maintien de l’ordre autour du chantier des mégabassines des Deux-Sèvres, Gérald Darmanin a répondu par la remise en cause des financements touchés par la Ligue des droits de l’homme. Une réponse qui n’a pas manqué de faire réagir les bénévoles de l’association ainsi que la gauche à l’hémicycle.
…à défaut d’avoir de vrais arguments
Une fois n’est pas coutume, l’exécutif pointe du doigt la responsabilité des manifestants et des groupes d’activistes dans l’explosion des violences ces dernières semaines. Le gouvernement est encerclé de toute part, entre protestations contre la réforme des retraites et contre de nouveaux projets jugés climaticides par les associations, comme les mégabassines de Sainte-Soline et l’autoroute A69.
À ces protestations, l’exécutif a choisi comme réponse le musellement. Mais il semblerait que montrer les muscles ne soit pas efficace. À l’heure actuelle, la dissolution prévue des Soulèvements de la Terre est loin d’être effective, du fait qu’il s’agisse d’une « décision lourde » selon le gouvernement. De son côté, l’association écologiste penche plutôt pour un manque criant de justifications légales pour une dissolution.
Les Soulèvements de la Terre n’est pas une association à proprement parlé, et ne tombe donc pas sous le coup de la loi de 1901. Les membres des Soulèvements de la Terre se revendiquent eux-même comme un mouvement composé d’une multitude d’affinités politiques. La loi contre le séparatisme, portée par Gérald Darmanin en 2021, lui permet aujourd’hui de justifier une dissolution d’association à l’origine de « manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens », estimant que c’est le cas pour le mouvement écologiste.
Benoît Feuillu, porte-parole des Soulèvements de la Terre, s’insurge face à un gouvernement qui n’a de cesse de « détourner l’attention ». Au delà de l’impossibilité matérielle de dissoudre un mouvement si volatile, Me Aïnoha Pascual, avocate du mouvement, précise qu’ »aucune des personnes se déclarant officiellement des Soulèvements de la Terre […] n’a fait l’objet de poursuites et condamnations pour des faits en lien avec les activités du mouvement ».
Bien que les menaces planant sur Les Soulèvements de la Terre ou la Ligue des droits de l’homme ne se traduisent pas forcément en actes, la symbolique est forte. À Matignon, on préfère un peuple muselé à une France debout.
Amina Sidi Yekhlef